Racontez votre projet comme un film hollywoodien

Par Eleonor Simiu

Présentation en comité de direction ou en séminaire cadre, rendez-vous commercial ou encore entretien d’embauche : bien raconter ses projets, c’est une compétence dont on a sans cesse besoin ! La forme rend la présentation plus attrayante, mais surtout aide vos interlocuteurs à entrer dans le sujet, mieux appréhender les enjeux, comprendre ce que vous avez vraiment fait.  Le récit met en valeur les réussites en évitant l’écueil de la vantardise. Voici cinq lignes directrices pour s’initier au storytelling, gagner en impact … voire prendre plaisir à l’exercice.

1. Prenez de la hauteur et évoquez votre Graal

Souvent, quand directeurs et managers racontent leurs projets, ils évoquent la phase de cadrage, la constitution de comité de pilotage, le choix des indicateurs de suivi, la structuration du programme… Levez la tête du guidon ! Pas besoin d’entrer dans la gestion de projet et la tuyauterie.

En revanche, il faut prendre le temps d’expliquer l’enjeu, au bon niveau, en faisant le lien avec les priorités de l’entreprise, et aussi évoquer le véritable déclencheur du projet. Ce catalyseur, comme disent les scénaristes, peut être interne ou externe : une perte de part de marché qui a agi comme un électro-choc, des dysfonctionnements de la production devenus insupportables … Il y a aussi un soin particulier à apporter à la logique, aux articulations de votre présentation : quels ont été les éléments clés de diagnostic qui ont motivé les décisions et les choix ?

2. Mettez les problèmes et les rebondissements au premier plan

Les directeurs de projets présentent souvent de beaux schémas powerpoint, sur lesquels on voit les différents chantiers, avec chacun ses livrables, son staffing, ses dates de fin… Mais les rectangles powerpoint escamotent les aspérités, les obstacles, les moments difficiles. On le sait bien, une véritable transformation rencontre forcément des résistances, la solution imaginée sur le papier ne sera pas celle qui sera déployée. Raconter une histoire, cela implique justement de donner une place aux problèmes, aux moments où la réalité résiste à la théorie et aux plans.

Quel est le moment, où vous avez douté, où vous vous êtes demandé si vous alliez vraiment y arriver ? Covid, panne informatique, prototype décevant, partenaire qui se retire du projet … Dans les projets d’ampleur comme dans les films, il y a toujours un moment où tout semble perdu, où le découragement s’abat sur l’équipe … Il faut se débrouiller avec de maigres moyens, trouver des solutions de contournement, aller chercher des ressources insoupçonnées au sein de l’équipe, se mettre en quête de nouveaux soutiens, prendre des décisions difficiles, agir malgré les risques. C’est dans les épreuves que se forgent les solutions justes, que se trouvent les vraies opportunités, que naît la créativité. Ce sont aussi les obstacles qui donnent toute sa saveur à la réussite finale.

Une histoire c’est plus captivant qu’un rapport … N’empêche qu’en entreprise, le public veut aussi des data ! Vous aurez quand même besoin de graphes et de schémas. Les bons orateurs entrelacent le récit, l’information et les chiffres, et adaptent subtilement le mix selon le contexte et les interlocuteurs.

3. Donnez vie à l’état des lieux

Les dix, quinze premières minutes d’un film constituent l’ouverture : en quelques scènes on découvre le monde du héros avant que ne démarre l’action à proprement parler. Et dans votre entreprise ? A quoi ressemblait votre « monde » — votre département, votre BU — avant le début du projet ? Des process manuels, des clients ou fournisseurs en situation de force, des rappels de produits coûteux … Quand vous prenez le temps de brosser le tableau, avec quelques chiffres et exemples bien choisis, vous voyez les participants hocher la tête, ça ne leur parle que trop bien. Vous « vous connectez » à votre public, et ce qui va suivre sera mieux mis en valeur.

La dernière scène d’un film fait généralement écho à la première, et montre le monde du héros métamorphosé. Comment votre projet a-t-il transformé l’entreprise ? Souvent la transformation ne se limite pas à l’atteinte des objectifs initiaux, aux ventes supplémentaires ou aux économies : la solidarité née pendant le projet va perdurer ; les relations avec les distributeurs sont rééquilibrées à votre avantage ; le projet de diminution des emballages a fait naître d’autres initiatives de développement durable … Certaines anecdotes sont révélatrices.

Pour donner vie à votre histoire, pour apporter de la chair à votre récit, vous avez besoin d’illustrer, de donner des exemples. Pour tenir dans le temps imparti, cela implique de restreindre le périmètre, de ne pas entrer dans toutes les ramifications d’un sujet. En bref, misez sur la profondeur plutôt que l’exhaustivité.

4. Préférez les images aux bullet points

De nos jours, la plupart des présentateurs utilisent à meilleur escient Powerpoint, ils font simple et surchargent moins les slides. Il reste cependant souvent une marge de progression.

Pas question notamment d’utiliser vos slides comme un pense-bête pour les points clés. En revanche, de vrais visuels, des photos, des graphes ou des images métaphoriques qui appuient, complètent votre propos, marquent les esprits. Parler sur une vidéo peut être très approprié, et contribue à la dynamique de votre présentation. Et si vous n’avez pas de visuels pour illustrer certains points ? Le mieux est parfois de se passer de support pour une partie de votre présentation.

5. Faites une place à l’émotion

Ce que les spectateurs d’un film viennent aussi — peut-être avant tout — chercher, c’est l’émotion. Pas question de transformer ce déploiement d’ERP en drame psychologique, mais peut-être pourriez-vous vous dévoiler un peu plus que d’habitude ? Qu’est-ce qui vous a rendu le plus fier ? Qu’est-ce que vous avez particulièrement apprécié dans ce projet ? Qu’est-ce qui vous a passionné ? La collaboration qui s’est mise en place, le déclic quand vous avez compris le vrai problème, le courage de se lancer alors que certains indicateurs étaient au rouge…

Pas besoin d’être un champion d’éloquence, les seuls ingrédients vraiment indispensables à une présentation réussie, ce sont le « fond » et la passion qui vous anime – un peu de préparation et de répétition, et votre présentation sera à coup sûr réussie.

Une présentation de projet est souvent vécue par les opérationnels comme une corvée, la tâche supplémentaire qui s’ajoute à un quotidien déjà chargé. Mais surtout quand on s’autorise à sortir un peu des sentiers battus, l’exercice s’avère aussi riche pour le présentateur que pour les auditeurs. C’est l’occasion de prendre du recul, de prendre conscience de vos véritables forces. Et si le contexte s’y prête, la dimension ludique peut être la cerise sur le gâteau.

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L’ambition de mon blog ? Vulgariser l’état d’esprit et les pratiques « consulting ». J’y reprends des conseils que j’ai eu l’occasion de donner à mes clients (et maintes fois répété à mes chers jeunes consultants). Je suis persuadée que certaines bonnes pratiques, pas si compliquées à intégrer, peuvent significativement améliorer la manière dont vous préparez vos dossiers, vous décidez, vous avancez sur vos projets stratégiques.

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Eleonor Simiu

Consultante indépendante en stratégie, spécialisée dans la grande consommation, l’automobile et l’assurance, j’aide mes clients à prendre du recul, à aborder leur problématique de manière factuelle, systématique, structurée. Coach certifiée, je crois en la puissance d’un diagnostic vraiment co-élaboré avec les équipes de mes clients.